Ce pays était plein de soleil et ses chemins portaient le parfum des fleurs. Il était gouverné par un roi juste qui prenait soin de ses sujets et se souciait du bien de chaque habitant. Un pauvre poète séjournant à sa cour était son favori, le roi croyait en son talent et il discutait souvent avec lui.


Un jour, le roi a demandé au poète de quitter le palais pour que celui-ci fasse connaissance des habitants du pays et qu’il se renseigne sur ce qu’ils desirent, ce qu’ils attendent de la vie. Le roi avait l’intention de leur assurer ce dont ils auront besoin.
Le poète a pris la route. Lors de son périple il demandait aux gens en quoi ils croyaient, ce qui était la vie pour eux et de quoi ils rêvaient. Il a rencontré une jeune femme dont la mère la forçait au travail tandis que les pensées de sa fille vaguaient dans les bois en cherchant des fées magiques- elle a dit qu’elle voudrait vivre dans un autre monde. Deux frères ont dit que la vie c’était un combat pour eux parce qu’ils se disputaient toujours l’héritage laissé par leur père. Le voleur en prison rêvait sa vie et son garde attendait impatiemment son repos éternel. Cependant ce qui manquait à la plupart des gens, c’était l’argent. Quand le roi a reçu le message de son poète, il a ordonné d’envoyer aux habitants du pays des sacoches remplies d’argent en croyant que grâce à cela ils pourraient réaliser leurs rêves. Mais l’année suivante ainsi que l’année d’après, ils ont encore demandé de l’argent jusqu’à ce que la trésorerie royale ait commencé à s’écrouler. C’est à ce moment-là que le roi a appelé encore une fois le poète.
– Dans la trésorerie il reste peu d’or. Est-ce qu’il y a quelque chose dont tu rêves ? – il a demandé
– Je voulais toujours ouvrir aux gens leurs cœurs – a répondu le poète
– Je te prie donc de prendre la route et de me décrire dans un poème ce que tu vivras. Je t’attendrai.
Le poète a fait comme l’a ordonné le roi. Il a parcouru le pays, a fait l’expérience de la violence de la tempête, de la solitude, du désert et de la fugacité d’un soir d’été. Il regardait les levers et les couchers du soleil. Il a connu la puissance de l’amour et la douleur de la perte, il a vu des sourires et des regards méprisants. Il a rencontré des personnes avec qui il festoyait des nuits entières sous le ciel étoilé, il a vu des miracles, des malades qui se levaient de leurs lits, il a pleuré et a ri aux larmes. Il priait à son saint patron et celui-ci l’accompagnait pour que le poète, en un instant, en un flash de lumière, puisse atteindre l’infini.
Un an après, il est retourné au palais, sa robe en lambeaux et la lumière dans les yeux. Le roi l’attendait. Le poète n’a pas récité le poème, mais en tremblant, il s’est approché et n’a chuchoté à son oreille qu’un seul mot. Ensuite, il s’est éloigné et a vu comme le visage du roi a commencé à pâlir et après s’est enflammé de la flamme intérieure. La lumière est apparue dans ses yeux : il était aveugle et tout d’un coup il a retrouvé l’usage de ses yeux.
– Je te remercie – a dit le roi et s’est immédiatement levé de son trône pour rejoindre sa femme et ses enfants.
Le poète, au clair de la lune, a commencé à écrire des poèmes contenant la parole ayant le pouvoir de donner la vie. Le roi a déposé un peu de cendre sur sa tête et est parti en voyage en parcourant le monde sous le déguisement d’un mendiant – parfois il vient aussi nous voir, demande du pain et de l’eau et ne prononce qu’un seul mot en partant et en nous souhaitant une bonne route.

Auteur: Mikołaj Wyrzykowski

Traducteur: Łukasz Ściesiński

illustration: Ania Kiszkowiak

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