Deux films francophones récents, à savoir Memory Box et Sous le ciel d’Alice, nous plongent dans le contexte de la guerre du Liban. Alors que la pays lui-même connaît en ce moment une autre grande crise, ces deux titres nous permettent de mieux comprendre l’histoire et nous font nous rendre compte de l’actualité.

Memory Box prend lieu dans deux villes différentes (ce qui m’a encore plus attiré vers le film): Montréal et Beyrouth. Alors que le Québec connaît une tempête de neige lors de Noel, un paquet arrive chez une famille. Il se trouve que ce sont les cahiers de la mère envoyés par sa meilleure amie. La mère refuse à la fille de les regarder, mais celle-ci (bien entendu) ne l’écoute pas. Cela nous plonge dans l’histoire de la jeunesse de la mère lors de la guerre du Liban et permet à la famille de mieux se connaître.

C’est justement le milieu du film qui est sa partie la plus forte. Lorsque la fille déballe les cahiers et plonge dans la lecture, nous sommes transportés par les images à Beyrouth: les photos deviennent animées, les personnages sortent du cadres et se promènent sur l’écran, ou encore les effets photographiques sont appliqués sur les plans mouvants du film. Une esthétique par laquelle j’ai été complètement happé, alors que le début et la fin de Memory Box semblent un peu forcés – mais comme dit le titre, il s’agit bien du milieu.

Sous le ciel d’Alice est un film rêveur, sur l’image idéalisée du Liban – c’est une véritable ode à ce pays, vu à travers les yeux d’une fille suisse qui décide d’y immigrer pour échapper à l’ennui de son pays et de sa famille. Ayant trouvé un travail à Beyrouth, elle coupe donc les liens (scène fantastique avec les racines coupées au pied), rencontre un homme (de sa vie, car la narration commence et termine par une lettre adressée à lui) et s’installe dans une nouvelle ville. Or bientôt son cours de vie est interrompu par les premiers émeutes annonçant la guerre civile…

Comme il s’agit au début d’un pays vu comme une terre promise, on regarde la fille marcher avec des images figées de la ville en arrière-plan – le lien avec Memory Box. Mais l’esthétique de Sous le ciel d’Alice est quand même complètement différente. L’histoire de la protagoniste, dont le prénom n’est pas sans hasard, est racontée par une théâtre de poupée; elle-même parfois, ce qu’on voit par le déplacement de la lumière, est comme une actrice sur une scène théâtrale; les hommes aux barricades, ce qui tient un peu des films de Wes Anderson, portent des masques d’animaux. Cependant, le rêve s’isole de plus en plus dans le pays déchiré par la guerre, jusqu’au départ total.

Une des tâches du cinéma est de nous faire voir ce qu’on ne voit pas habituellement, et ceci comprend également les événements actuels. Les crises lointaines à nos pays ne s’apprennent pas à l’école; il faut une heureuse rencontre d’une personne, d’un article, d’une oeuvre d’art. Ce n’est pas non plus une facilité psychologique que de ressentir une empathie avec ce qui nous est aussi lointain. Mais l’art crée justement des liens, bâtit des ponts. Même si l’on ne comprendra pas la totalité de la guerre civile ni de la crise économique (couplé avec les autres) actuelle, ces deux films-là, Memory Box et Sous le ciel d’Alice, nous plongent quand même dans un univers qui permet de lancer notre regarde un peu plus loin (surtout d’ici, de Montréal) et d’être un peu plus conscient des événements que l’on peut vivre sur l’écran et se sentir aussi concernés. Quand les événements réels nous paraissent comme de la fiction, c’est justement la fiction qui nous permet de mieux percevoir la réalité.

Les films vus dans le cadre du Festival du Cinéma Francophone CineMANIA.