On a perdu la patience avec les autres de capacités animalières. Nos sens ne sont plus aussi aiguisés qu’avant et, lâchés en pleine nature, on ne saurait pas comment se comporter, survivre. Notre évolution est une histoire d’isolement. Comment, dans un monde où l’on comptabilise chaque instant, pister et attendre la venue de la panthère des neiges?


Vers la fin du film (la „panthère” dans son titre étant très bien traduite en polonais en „fantôme”) Sylvain Tesson énumère quelques principes qui commencent plus ou moins ainsi:

se contenter du monde, ne rien espérer, jouir de ce qui s’offre à nous, lutter pour que cela demeure…

Avec le photographe Vincent Munier, il était parti au Tibet pour tracer la panthère des neiges, l’animal probablement le plus difficile pour l’affût – admettons-le, les deux hommes et nous aussi on veut la VOIR. Or déjà chercher produit un certain de types savoir, celui qui, transmis maintenant seulement par les quelques nomades qui continuent leur mode de vie, consiste à se fondre dans le paysage, devenir sa partie intégrante, y vivre en harmonie et en connaissance du vivant avec lequel on partage ce milieu. On a oublié comment c’est de pénétrez dans une région intouchée par l’homme et pratiquer le plus vieux métier du monde, à savoir le pistage. Aveuglés par notre anthropocentrisme, on ne sait plus lire le monde

„Les dispositifs de captage de l’attention contemporains nous rendent incapables de fixer notre concentration sur un présent, sur un désir suivi, d’aller au rythme des choses” écrit Baptiste Morizot dans „Sur la piste animale”. Il ajoute, dans le même chapitre sue le postage de la panthère des neiges, qu’il faut „activer en soi les pouvoirs d’un corps différent”, et qu’on est plein d’animalités intérieures. Il y a donc un espoir.


Le film „La panthère des neiges” est donc un exercice de patience: on attend, mais l’on ne sait pas si l’on pourra jouir de la vue, on doit rester dans le désir incertain de voir. Entre-temps il y a tout un monde qui s’offre à nous – comment fait-on pour passer à côté de lui, fermer nos yeux et, dans notre vie quotidienne, ne s’occuper que de soi?


Les photos sublimes du Tibet, les commentaires et les conversations de Sylvain Tesson avec Vincent Munier ne sont aucunement une romantisation de notre relation à la Nature, ou une invitation à quitter les villes. Dans la salle de cinéma on apprend à bien regarder, car tout est dans le regard. Mes yeux se dessillent, je me réveille peu à peu pendant la séance.


Pour ceux qui souhaitent continuer cet éveil au monde par le regard et par la lecture, je vous recommande vivement de lire „Sur la piste animale” de Baptiste Morizot, ses réflexions complètent parfaitement le film.